Vendre un fonds de commerce
Un fonds de commerce correspond à l’ensemble des éléments matériels et immatériels utilisés pour exploiter une activité commerciale, artisanale ou industrielle (clientèle, achalandage, nom commercial, enseigne, droit au bail, brevet, licence, marque, dessins et modèles, etc.). La vente d’un fonds de commerce est complexe à mettre en œuvre et est soumise à des formalités particulières, présentées ci-après.
Les étapes de la cession du fonds de commerce
La négociation de la vente du fonds de commerce
Afin d’arriver à un accord sur les conditions de la cession du fonds de commerce, les parties vont négocier. Au nom de la liberté contractuelle, chaque partie est libre de contracter ou de ne pas contracter, mais plus encore, elle est libre de rompre les pourparlers quand elle l’entend, sous réserve de satisfaire aux exigences de la bonne foi. Pour plus de précision sur les pourparlers, une note a été spécifiquement consacrée aux conditions exigées de la rupture des pourparlers pour qu’elle ne soit pas considérée comme fautive.
Toutefois, afin d’encadrer et de sécuriser les négociations qui peuvent être complexes, il peut être utile de recourir à des « avant-contrats » : lettre d’intention (LOI), contrat de pourparlers, contrat de négociation, etc. Il est utile de prévoir dans ces contrats un certain nombre de clauses : durée des négociations, charge financière d’éventuels frais (expertise du bien, estimation, etc.) et accord de confidentialité ou d’exclusivité.
Plus concrètement, dans le cadre de la négociation, afin que le vendeur s’assure de céder son fonds de commerce au bon prix, il va falloir déterminer sa valeur, ce qui n’est pas chose aisée. Pour cela, il existe plusieurs techniques comme l’évaluation du fonds réalisée en fonction du chiffre d’affaires réalisé et appliqué à un barème publié. Une autre technique consiste à effectuer une estimation du fonds selon sa rentabilité en prenant la moyenne des excédents bruts d’exploitation ou du résultat net.
Il est également possible de réaliser une comparaison avec d’autres fonds similaires en vente sur le marché ou de déterminer l’actif de l’entreprise en valorisant tous les éléments du fonds comme les machines, le montant du loyer du bail commercial, les stocks, les brevets, etc. (cela est parfois très complexe, notamment pour les biens incorporels).
Afin d’arriver à une estimation au plus près de la valeur réelle, il est conseillé de recourir à plusieurs de ces techniques et de prendre le résultat moyen.
Si les parties sont d’accord sur la chose, ici le fonds de commerce, et le prix de vente, il faudra procéder à la rédaction d’un compromis de vente (ou promesse de vente) avec d’éventuelles conditions suspensives notamment relatives aux formalités ci-dessous détaillées (déclaration préalable à la mairie, information des salariés), mais aussi relatives aux conditions de financement.
À ce stade, le vendeur peut exiger le paiement d’une indemnité d’immobilisation qui vise à sécuriser la transaction et indemniser la « réservation » du fonds à l’acheteur. Ainsi, il pourra être prévu les conditions dans lesquelles l’indemnité sera restituée ou non en cas d’échec de la vente et notamment lorsque la vente n’aboutit pas à cause d’une faute de l’acquéreur.
Les conditions de validité de la vente du fonds de commerce
Tout d’abord, les parties doivent avoir la capacité de contracter (majeur, non atteint d’incapacité) et leur consentement doit être exempt de vice (erreur, dol et violence). Le vendeur devra s’assurer que ces conditions sont bien remplies, car leur défaut pourra entraîner la nullité de la vente.
De plus, le cédant doit avoir le pouvoir de procéder à la cession : il s’agira du propriétaire du fonds ou d’un tiers qui a reçu le pouvoir. De même, lorsque le cédant est marié, il faudra le consentement des deux époux si le fonds est un bien commun.
Les mentions obligatoires de l’acte de vente du fonds de commerce
L’acte de cession du fonds de commerce peut aussi bien être un acte notarié, qu’un acte sous seing privé.
Avant la loi du 19 juillet 2019, le Code de commerce prévoyait que l’acte de cession du fonds de commerce devait mentionner obligatoirement et à peine de nullité : le prix de cession, la provenance du fonds (identité du prédécesseur du vendeur et date et prix de la cession précédente), l’état des privilèges et des nantissements du fonds, le chiffre d’affaires et le résultat d’exploitation des 3 derniers exercices et les éléments d’information du bail commercial (durée du bail, identité du bailleur, etc.).
Depuis la Loi n° 2019-744 du 19 juillet 2019 (art. 1er) dite « de simplification, de clarification et d'actualisation du droit des sociétés », cette exigence a été supprimée. Il n’y a donc plus aucune mention qui doit obligatoirement figurer dans l’acte de cession.
Toutefois, même si ces mentions ne sont plus obligatoires, il sera bienvenu de préciser toutes les conditions dont les parties souhaitent apporter une place particulière si cela n’a pas été déjà le cas lors de la promesse de vente (prix ; modalité de paiement ; reprise des contrats ; clause résolutoire).
En effet, pour le vendeur, cela présentera l’avantage de se ménager une preuve quant au consentement de l’acheteur aux conditions de la vente.
Les éléments de la vente du fonds de commerce
Lors de la vente du fonds de commerce, l’acquéreur (dit cessionnaire) achète tous les éléments, autant corporels qu’incorporels, le composant.
D’une part, il y aura les éléments incorporels comme la clientèle, le droit au bail, l’enseigne, les dessins et modèles, les brevets, les licences, les marques et le nom de domaine.
D’autre part, il y aura tous les éléments corporels, c’est-à-dire les biens matériels : marchandises, mobilier, outillage, machine et matériel nécessaire à l’exploitation de l’activité.
Ces éléments devront faire l’objet d’un inventaire détaillé et estimatif de leur valeur afin de déterminer quels sont les biens qui feront partie de la vente. À ce titre, un formulaire Cerfa existe (formulaire Cerfa 11275*05) et devra être déposé en 3 exemplaires lors des formalités d’enregistrement ci-après détaillées.
Concernant le bail commercial, il est obligatoirement cédé avec le fonds de commerce (toute clause contraire sera réputée non-écrite) et la transmission du bail pourra être soumise à l’agrément préalable du bailleur. Ainsi, il faudra conditionner la réalisation de la vente à l’obtention de cet agrément dont le refus ne devra pas être abusif, sinon la cession pourra être inopposable au bailleur. Toutefois, les conditions imposées par le bailleur ne peuvent jamais empêcher le locataire de céder son droit au bail avec le fonds.
À noter qu’il est possible de céder son droit au bail de façon isolée. La rédaction du bail commercial, la vente du bail commercial, l’achat d’un bail commercial et le renouvellement du bail commercial faisant l’objet de notes distinctes, ils ne seront pas traités ici.
Toutefois, certains éléments ne sont pas transmis à l’acheteur, il s’agira :
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des contrats en cours (sauf s’il a été convenu autrement, les contrats en cours ne sont pas transmis au cessionnaire. Seuls le droit au bail, les contrats de travail et le contrat d’assurance seront cédés automatiquement avec le fonds) ;
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les documents comptables et les livres de commerce ;
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les créances et dettes ;
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les immeubles ;
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les droits de terrasses qui devront faire l’objet d’une nouvelle autorisation d’occupation.
Une fois que les parties se seront mises d’accord sur les conditions de la vente, certaines formalités seront à réaliser.
Les formalités de cession du fonds de commerce
L’information des salariés
Lorsque l’entreprise comporte moins de 250 salariés, le vendeur doit obligatoirement informer individuellement chaque salarié du projet de cession du fonds de commerce, selon la modalité de son choix (affichage avec signature d’un registre, courrier électronique, LRAR, remise en main propre avec récépissé, acte d’huissier de justice, etc.).
Ceux-ci disposeront d’un délai de deux mois à compter de l’information qui leur a été faite pour proposer une offre de rachat du fonds de commerce, délai pendant lequel la vente ne peut donc intervenir (sauf à ce que chacun ait indiqué qu’il ne formulerait pas d’offre).
La vente doit intervenir dans un délai de deux ans, faute de quoi, une nouvelle information devra être réalisée.
Si cette information n’est pas faite, les salariés pourront saisir le juge qui pourra leur allouer des dommages-intérêts de la part du vendeur et de l’acheteur si un préjudice a été causé par sa faute. De même, l’acheteur pourra être condamné à une amende d’un montant maximal correspondant à 2% du prix de cession.
À noter enfin que, ne sont pas concernés pas cette obligation :
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le fonds artisanal, libéral et rural ;
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les cessions faites à un époux, un partenaire de pacs, un ascendant ou un descendant ;
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les transmissions par succession ;
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lorsque l’entreprise fait l’objet d’une procédure collective.
La déclaration en mairie
Dès lors que le fonds de commerce est situé dans une zone de « sauvegarde des commerces et de l’artisanat de proximité », la commune dispose d’un droit de préemption sur l’achat du fonds dans le but de le rétrocéder à un commerçant ou un artisan.
À cette fin, le cédant devra réaliser une déclaration préalable auprès de la marie avec les informations suivantes : prix, activité du repreneur, nombre de salariés et dernier chiffre d’affaires. La mairie disposera alors d’un délai de deux mois pour se positionner.
Si cette déclaration n’est pas faite, la vente pourra être annulée.
Les formalités de publicités
Une fois que l’acte de cession a été signé, des formalités de publicités seront à réaliser, mais elles incomberont à l’acheteur : il faudra publier une annonce auprès d’un journal d’annonces légales (JAL) dans les 15 jours de la vente et informer le greffe du tribunal de commerce de la vente dans les 3 jours suivant la publication de l’annonce au JAL afin qu’il publie un avis au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC).
Ces publications rendront la cession opposable aux tiers.
Concernant le cédant, ses créanciers pourront exercer leur droit d’opposition au paiement du prix de vente entre ses mains dans un délai de 10 jours (ou auprès d’un séquestre s’il y a lieu). Dès lors, même si ces obligations de publicité ne lui incombent pas, le vendeur doit s’en tenir informé.
L’enregistrement de l’acte de cession
L’acquéreur du fonds de commerce devra enregistrer l’acte de cession du fonds de commerce auprès du bureau d’enregistrement du service des impôts des entreprises (SIE). Lors de cet enregistrement, il devra également déposer le formulaire concernant l’état détaillé des biens matériels vendus avec le fonds ainsi que le formulaire de mutation du fonds de commerce et procéder au paiement des droits d’enregistrement afférant.
Concernant le cédant, il est à noter que si l’enregistrement n’est pas réalisé, il ne peut bénéficier du privilège du vendeur d’un fonds de commerce : il doit donc également s’en tenir informé.
Les déclarations fiscales
Lors de la vente du fonds de commerce, le cédant devra réaliser des déclarations fiscales. Il devra clôturer ses comptes et déclarer ses revenus pour faire l’objet d’une imposition immédiate sur ses bénéfices. Selon le statut juridique du cédant, il disposera d’un délai de 45 ou 60 jours pour faire cette déclaration (6 mois pour les ayants droit en cas de décès).
À ce titre, il est à noter que sauf clause contraire dans l’acte de vente, l’acquéreur peut être tenu solidairement responsable du règlement de l’imposition du cédant au titre des bénéfices réalisés pendant l’exercice au cours duquel l’achat est intervenu.
Si le cédant réalise une plus-value, il pourra bénéficier d’une exonération totale ou partielle sur celle-ci selon le type d’activité et en fonction du montant des recettes annuelles. Cette exonération sera exclue si le cédant n’exploitait pas ce fonds à titre professionnel.
Concernant la TVA, le cédant devra faire une déclaration après du service des impôts des entreprises dans un délai de 30 jours après la publication auprès du JAL. Toutefois, il pourra être exonéré de TVA sur les biens et prestations vendus lors de la cession lorsque la vente porte sur la totalité du fonds de commerce (et que l’acquéreur est lui-même redevable de la TVA).
Enfin, même si le cédant a vendu le fonds en cours d’année, il doit verser la contribution économique territoriale (CET) pour l’année entière (sauf accord avec l’acquéreur).
Le séquestre
Si l’acheteur le souhaite, il peut mandater un séquestre afin de retenir le prix de vente pendant un délai minimum de 105 jours à partir de la date de vente le temps que toutes les formalités soient réalisées. Ainsi, le cédant ne percevra pas ces sommes tant qu’il n’aura pas rempli toutes les formalités auxquelles il est astreint et détaillées ci-dessus.
De plus, il est à noter que ce séquestre pourra recevoir les oppositions éventuellement formulées par ses créanciers.
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Le Cabinet DAVIDOVA AVOCAT, intervenant en droit des affaires, accompagne les dirigeants d'entreprises et les entrepreneurs sur tous les aspects ayant trait à leur activité et au développement de leur entreprise ou société. Le Cabinet DAVIDOVA AVOCAT accompagne ainsi le chef d’entreprise qui souhaite vendre ou acheter un fonds de commerce au stade de la négociation, mais également de la réalisation de la cession avec toute la documentation juridique obligatoire.